Après avoir découvert la sérigraphie à San Francisco, Rathur LD est de retour à Nantes depuis 2013 avec des bombes de peinture sous le bras et des idées plein la tête.
Installé dans le quartier Graslin, il y récupère des palettes de bois pour en faire des supports de création. Avec une affection particulière pour l’encre de Chine, son style se situe entre l’abstrait et le figuratif avec une petite dose de psychédélisme. Entre des projets d’affiches, de dessin et de menuiserie, il s’attelle à peindre des fresques murales. Pour ces dernières, il est notamment passé par plusieurs murs du plan graff. Rencontre avec Rathur LD :
Pick Up Production : Artistiquement parlant, comment s’est passée ton année 2020 et comment entames-tu 2021 ?
Rathur LD : cet été j’ai pu expérimenter des travaux avec la bombe et la scie sauteuse sur différents projets aux ateliers Magellan. J’ai notamment bossé sur une partie de la scénographie pour la Saison Déconfinée : la déco du bar, de la cage du fauve et le tigre à bascule. À Malestroit, j’ai eu l’occasion de travailler sur la déco d’une brasserie, « Barque! ». Le reste de la saison était bien rempli avec des ateliers graffiti, une exposition solo à Clisson pendant le temps du déconfinement de septembre à novembre. J’ai plutôt eu du bol en fait.
En ce moment, je prends le temps de bosser sur des grands formats et je refais de la BD. Pas mal d’encre de Chine. Sans rentrer dans les détails, ce n’est vraiment pas l’inspiration qui manque !
PUP : Tu as peint plusieurs œuvres sur des murs légaux du Plan Graff mis en place par la ville de Nantes et Pick Up Production. Comment as-tu découvert ce dispositif ?
R.LD : De mémoire, j’avais aperçu un panneau près d’un mur et en recherchant sur le net j’avais pu voir que Pick Up gérait les autorisations. J’avais assez peur du résultat de mes premiers graffitis, donc je suis pas mal allé faire des brouillons au niveau de la rue Paul Nizan. J’en ai sincèrement raté plusieurs avant que ça me plaise. Ça ne marche pas du premier coup ! Mais je trouve que c’est important de garder une trace avec soi des premiers graffitis ou collages. Quand tu as l’impression que ce que tu fais aujourd’hui te semble naze, ça aide à relativiser. Un peu comme garder un dessin qui date de la maternelle. C’est une pratique qui rend assez exigeant et un format qui donne toujours envie de faire des pièces de plus en plus grandes. Ça permet aussi aux gens d’avoir une bonne visibilité sur ton travail.
PUP : Pourquoi es-tu venu peindre sur ces murs en particulier ?
R.LD : La rue Paul Nizan est un spot bien cool pour commencer (même pour continuer d’y graffer), dans le sens où la durée de vie d’un graff là-bas est très aléatoire, ça tourne tellement. Ta pièce peut être recouverte dès le lendemain. Tu as moins de pression si tu te craques, car ça se fond bien dans la masse. Et puis le quartier est sympa, on y croise souvent du monde.
La première fois que je suis allé bomber boulevard Louis Barthou (sous le pont Aristide Briand), c’était quand même pas pareil en terme d’expo et de surface, ça changeait de cadre aussi. Sans compter que, en toute modestie, quand tu te pointes (enfin) sur un nouveau mur qui change de d’habitude, tu prépares ton matériel, tu te rends sur place et tu vois que finalement tu recouvres un graff de Smerf et que le mur d’à côté c’est Ador t’as pas trop envie de te rater… Ça s’est très bien passé au final.
PUP : Plus généralement, que permettent selon toi, les murs du Plan Graff aux graffeur·euse·s et peintres de la métropole nantaise, ou d’ailleurs ?
R.LD : Je trouve que ça permet beaucoup de rencontres. Tu es souvent amené à croiser d’autres graffeur·euse·s qui connaissent un·e tel·le qui connaît cette personne, qui est pote avec ce groupe de gens, qui sont en fin de compte des gens que tu as déjà croisés. C’est une cours de récréation géante.
Le fait d’avoir ce côté accessible, tu trouves plein de styles différents, que ce soit le tag, le wildstyle, l’art mural ou encore le collage. Cette dernière pratique est parfois vue comme du vandalisme ou de l’illégal, alors que franchement tu colles simplement du papier. Ça reste du street art aussi légitime que le graffiti selon moi.
PUP : Quel avenir souhaites-tu à ce dispositif ?
R.LD : L’accueil du graff sur Nantes a bien évolué et est mis en avant. Ça donne envie d’avoir ce genre de dispositif répandu partout, il faudrait retrouver un lieu comme les anciens abattoirs de Rezé (maintenant le site de Transfert) ! Je dis ça, mais c’est pas non plus comme si les surfaces manquaient sur Nantes.
Crédits photos : @RathurLD